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C'est mon anniversaire

 

C'est mon anniversaire.

 

Je me suis dis que j'allais faire un p'tit truc pour ce non-événement absolu mais pas tout à fait, relativement parlant *.

 

Que j'allais écrire, dessiner, peindre.

 

Changer ma photo de profil car celle affichée de me correspond pas vraiment.

 

Il faut ou être joyeuse ou faire jolie.

 

Alors que des fois, j'ai envie de faire la gueule. J'ai envie d'en jouer. […]. J'ai envie de faire la gamine alors que l'on me donne du « Madame !». Et alors !

 

On est définitivement plurielle. Non. Oui. Evidemment.

 

 

 

Alors, finalement, j'écris. Un texte tout en vrac, tout en prose.

 

Car j'ai l'âge où j'ai envie de faire connaître mes écrits.

 

Ce n'est pas forcément de la grande poésie ou […]. Je m'en fous.

 

Je m'en fous, des sonates, de la forme, pourvu que le fond sente la sincérité.

 

Ecrire ? Me dire. Un ego qui se flatterait. Peut être.

 

Un peu. Mais pas que. J'ai aussi appris qu'il est toujours temps de prendre sa place.

 

 

 

C'est mon anniversaire.

 

 

 

J'ai un âge où j'ai appris à m'accepter,

 

avec ces marques du temps sur ma peau, ces vergetures - et je n'en suis plus dégoûtée.

 

J'y lis y une histoire, la mienne, la nôtre, mes enfants. Mes prunelles.

 

Mon ventre. Ce sont des histoires nées et d'autres avortées.

 

 

 

J'en suis à l'âge où je regarde désormais mes mains, celles qui ont été paysannes, avec bienveillance.

 

A trop les maltraiter, par amour, par envie, par oubli, j'ai fini par presque les perdre.

 

C'est con et pourtant.

 

Peindre, écrire. Aimer. Les mains, ça fait tout ça.

 

 

 

J'ai l'âge de dire merde à quelques uns.

 

A ces hommes qui ne m'ont pas aimée. Qui ont juste vu en moi une infirmière.

 

J'ai appris à voir dans ces « je t'aime » qu'une supplique pour ne pas être abandonné.

 

Grâce à vous, et que c'est dur, j'ai appris à dire stop. Merde et merci.

 

 

 

J'ai l'âge de dire merci à ceux qui m'ont touchée, d'un mot,

 

qui ont su me faire grandir par un pardon,

 

de dire merci à celui qui [beurk].

 

 

 

J'ai l'âge de dire merde à tous ces gens qui avec leur petit pouvoir se croient obligés d'affliger à leurs pairs leurs déboires et leurs frustrations. Histoires vécues.

 

Pensées pour ces premiers patrons, qui m'ont virée sans un mot parce que des maux ont été exprimés.

 

Merde et merci.

 

J'ai appris à rester droite dans mes bottes et à revendiquer ce qui m'était dû. A commencer par le respect, qui ne saurait être unilatéral. La maladie du 'tu-me-dois le-respect-parce-que-tu-es-plus-jeune' est chronique.

 

 

 

J'ai l'âge de choisir ma famille. Celle de cœur. De ne plus vouloir plaire à tout prix à des êtres avec qui on ne partage en définitive que quelques gènes et beaucoup de gêne.

 

 

 

J'ai l'âge où ma môme est devenue une ado.

 

Où elle est belle mais elle ne me croit pas. Merde. Chérie, t'es magnifique !

 

Putain d'images, de celles racoleuses, de celles photoshopées. Faut pas croire. Je sais que tu sais mais l'époque est dure, violente c'est vrai. Jeuniste. Elle respecte rien, pas même ses jeunes. Ironie.

 

Regarder ces minots de 20 ans, qui pourraient être mes gosses et qui paradent dans des magazines de fringues classieux. Décadent. Follement débilitant. Pour eux, les 20 ans, pour nous, leurs aînés.

 

Et de m'interroger sur nos responsabilités d'adulte.

 

 

 

Photographe, j'ai envie de faire des photos qui encensent les femmes de 40, de 70 ans et les filles de 15 ans aussi, autrement. Montrer comment elles sont belles quand elles sont elles. J'ai aussi envie de monter ces corps, ceux qui ont souffert dans leur chair. Ou dans leur âme. Faire sens.

 

 

 

J'ai l'âge d'avoir un presque ado, qui a dans sa voix les notes sucrées de l'enfance, des « maman, je t'aime ».

 

« Va, mon gars ! ». Avance. Crois en toi. Même si tu ne rentres pas dans les clous. Garde confiance. Je t'accompagnerai comme je peux, comme je t'aime.

 

 

 

J'ai un âge où je sais que j'ai des choses à dire, à faire, à montrer. Ou j'ai ENVIE. Ou je le FERAI. Quand bien même ce n'est pas dans l'air du temps. Justement.

 

Mes histoires ? « Trop poétiques », dixit un éditeur.

 

Mes images ? [**…].

 

« On dirait du Saint-Exupéry », m'a dit quelqu'un. Ouah. Quel compliment.

 

Un de ces mots qui aident à garder le cap. L'envie. Le courage.

 

 

 

Oui, j'ai l'âge où je veux faire des bouquins pour parler aux minots et dire aux grands comme il y a intérêt à rester gosse. Garder des étoiles dans les yeux et avoir la force de « faire », comme l'adulte que l'on est devenu.

 

 

 

J'ai l'âge où j'ai envie de prendre ma place. Je n'ai plus envie de démissionner.

 

Je l'ai souvent fait, de guerre lasse devant l’imbécillité patente de certains (bon, c'est fort, ça : on ne se refait jamais tout à fait !) ou le manque de sérieux ou de cohérence.

 

Une pensée ici pour cette jeune altermondialiste, 15 ans, qui bouscule les géants du monde et moi avec. Appel à se réveiller. A se bouger. A dire aussi des choses et à agir. Faire des livres : je crois que c'est là mon chemin.

 

 

 

Alors, voilà. C'est ça mon âge.

 

Ou dinosaure ou encore trop jeune pour être prise au sérieux, pour les autres, c'est selon.

 

En tout cas, un âge où j'ai envie d'être sérieusement moi :-) !

 

 

 

Et je le dis ici, il est une chose dont je suis sûre : il en est que ça rend beau l'âge.

 

J'ai juste envie d'oeuvrer en ce sens.

 

 

 

Johanne, 6 février 2019

 

 

 

* un grand merci pour vos mots et messages. ** chacun pourra se faire un avis sur mes galeries en ligne ;-)

 

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